Déontologie
Informations sur la décision
Le gendarme X a initialement été accusé de cinq infractions présumées au Code de déontologie de la GRC comportant de la violence sexuelle et physique à l’endroit de ses deux jeunes filles. L’autorité disciplinaire a supprimé une allégation de l’avis d’audience disciplinaire avant qu’il soit signifié. Trois autres allégations ont été retirées au cours des discussions aux fins de règlement tenues entre les parties. Ces dernières ont finalement présenté une proposition conjointe dans laquelle le gendarme X a admis une allégation modifiée. Le Comité de déontologie a accepté la proposition conjointe et a imposé une mesure disciplinaire, à savoir une sanction financière équivalant à 20 jours de solde.
Contenu de la décision
Protégé A
2022 DAD 1
Ordonnance de non-publication : Par ordonnance du Comité de déontologie, la publication de toute information permettant d’identifier Mme Y ou ses enfants est interdite.
GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
Affaire intéressant
une audience disciplinaire tenue au titre de la
Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), ch. R-10
Entre :
Surintendante principale Marlene Bzdel
Autorité disciplinaire
et
Gendarme X
Matricule [caviardé]
Membre visé
|
Décision du Comité de déontologie Gerald Annetts 12 janvier 2022 |
Me Denys Morel et sergente d’état-major Julie Beaulieu, représentants de l’autorité disciplinaire
Me Caitlyn Fleck et Me David Butcher, représentants du membre visé
TABLE DES MATIÈRES
Décision relative à l’allégation
SOMMAIRE
Le gendarme X a initialement été accusé de cinq infractions présumées au Code de déontologie de la GRC comportant de la violence sexuelle et physique à l’endroit de ses deux jeunes filles. L’autorité disciplinaire a supprimé une allégation de l’avis d’audience disciplinaire avant qu’il soit signifié. Trois autres allégations ont été retirées au cours des discussions aux fins de règlement tenues entre les parties. Ces dernières ont finalement présenté une proposition conjointe dans laquelle le gendarme X a admis une allégation modifiée. Le Comité de déontologie a accepté la proposition conjointe et a imposé une mesure disciplinaire, à savoir une sanction financière équivalant à 20 jours de solde.
INTRODUCTION
[1] L’autorité disciplinaire a convoqué une audience disciplinaire relative à cette affaire le 10 juin 2020. Cinq allégations d’inconduite ont été formulées contre le gendarme X relativement à des incidents de violence physique et sexuelle à l’endroit de ses deux filles, qui sont survenus entre le 20 décembre 1999 et le 30 juin 2011. Le 12 juin 2020, j’ai été nommé au Comité de déontologie. Le 9 décembre 2020, l’avis d’audience disciplinaire, duquel l’une des allégations avait été supprimée, a été signifié au gendarme X.
[2] Conformément au paragraphe 15(3) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291, le gendarme X a fourni sa réponse à l’avis d’audience disciplinaire. Dans sa réponse, il a admis certains détails, mais il a nié les quatre allégations. L’audience devait commencer le 13 décembre 2021. Toutefois, avant le début de l’audience, les parties sont parvenues à une entente en vue de répondre aux allégations. Elles ont présenté une proposition conjointe, dans laquelle le gendarme X a admis une allégation modifiée, et l’autorisé disciplinaire a retiré les trois autres allégations.
ALLÉGATION
[3] L’allégation modifiée se lit comme suit :
Allégation no 1
À divers moments entre 2001 et 2011, près ou à proximité de [texte caviardé], le gendarme X a adopté une conduite déshonorante en contravention de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).
Énoncé détaillé
1. Pendant toutes les périodes pertinentes, le [gendarme X] était membre de la GRC, affecté à la [texte caviardé].
2. [texte caviardé].
3. En 1993, [le gendarme X] et [Mme Y] se sont mariés. Ils ont eu deux filles; la première [fille 1] est née [texte caviardé]et la deuxième [fille 2] est née [texte caviardé].
4. À une occasion en juin 2001, [le gendarme X] est allé dans le solarium du deuxième étage et a laissé la porte ouverte. Sa [fille 2] l’a suivi et l’a appelé [traduction] « papa » d’une voix forte. Le [gendarme X] l’a frappée sur la fesse pour qu’elle rentre dans la maison parce qu’elle n’était pas en sécurité à cet endroit. En réponse, sa [fille 1] s’est approchée et lui a dit [traduction] « papa soit gentil ». Le [gendarme X] s’est mis en colère et a ensuite commencé à les frapper toutes les deux parce qu’elles l’avaient pointé du doigt. Les deux filles ont pleuré. Lorsque [Mme Y] l’a confronté à propos de la situation, le [gendarme X] a déclaré qu’il ne pouvait pas laisser passer leur manque de respect. Il reconnaît maintenant qu’il y avait de meilleures façons de faire face à la situation. Son recours à la force n’était pas raisonnable dans les circonstances.
5. À l’été 2002, le [gendarme X] et [Mme Y] se sont séparés.
6. La séparation du [gendarme X] et de [Mme Y] était acrimonieuse, ce qui a mis à rude épreuve la relation de ce dernier avec ses filles. Au cours des deux premières années de la séparation, il y a eu des différends constants au sujet de la garde et du droit de visite des [fille 1] et [fille 2]. Le [gendarme X] et [Mme Y] sont parvenus à une ordonnance sur consentement le 16 juin 2004 par laquelle ils ont obtenu un divorce, et la garde exclusive des [fille 1] et [fille 2] a été confiée à [Mme Y]. L’ordonnance a également accordé au [gendarme X] un droit de visite de ses [fille 1] et [fille 2] toutes les deux fins de semaine et pendant quatre semaines durant les vacances d’été.
7. Au début de la séparation, soit de 2002 à environ 2004, les transferts de garde ont parfois été très difficiles. [Mme Y] demandait à plusieurs membres de sa famille et de son église d’être présents. Le deuxième conjoint de [Mme Y] a confirmé que cette dernière avait une attitude antagoniste envers le [gendarme X]. La [fille 1] réagissait de façon très émotive, faisait des crises de colère, était physiquement malade et refusait de quitter la maison de sa mère. Elle s’agrippait souvent à différents objets dans la maison pour éviter de partir. Parfois, le [gendarme X] décidait de la laisser et emmenait seulement sa [fille 2]. À plusieurs reprises, [Mme Y] a dû transporter sa [fille 1] hors de la maison pendant que celle-ci protestait et la remettre au [gendarme X], qui l’a plaçait ensuite physiquement dans l’automobile.
8. Le 31 janvier 2004, la [fille 1] est devenue très émotive et a refusé d’aller avec le [gendarme X]. Ce dernier l’a transportée par-dessus son épaule et l’a forcée à entrer dans la voiture. Sa [fille 1] essayait de s’enfuir. Le [gendarme X] a rapidement fermé la portière de l’automobile et des cheveux de [sa fille 1] sont restés coincés dans la portière. La [fille 1] s’est immédiatement libérée, a sauté sur le siège avant et est sortie de l’automobile. Le [gendarme X] l’a immobilisée et a usé de force physique pour boucler sa ceinture. La [fille 1] a dit au [gendarme X] qu’il la pinçait et la blessait. Après cet incident, la [fille 1] avait une éraflure à la jambe causée par la boucle de la ceinture et des ecchymoses à un bras. Par conséquent, à son retour de la visite chez son père, elle a été transportée à l’hôpital. Le médecin traitant a signalé l’incident au ministère des Services à l’enfance et à la famille. Le [gendarme X] reconnaît maintenant qu’il y avait de meilleures façons de résoudre la situation. Son recours à la force n’était pas raisonnable dans les circonstances.
9. Pendant leur séjour avec le [gendarme X], la [fille 1] et la [fille 2] se bagarraient et se disputaient souvent. À l’occasion, le [gendarme X] se mettait en colère, haussait le ton et employait parfois la force physique pour les séparer. Il reconnaît maintenant qu’il existe de meilleures façons de faire face à une telle situation. Son recours à la force n’était pas raisonnable dans les circonstances.
10. Bien qu’il n’ait pas eu l’intention de blesser sa [fille 1] ou sa [fille 2], le [gendarme X] reconnaît que ses gestes ont causé la détresse émotionnelle et la crainte de celles-ci, ce qui a contribué à leur réticence à le voir et à la rupture éventuelle de leur relation.
11. La [fille 1] et la [fille 2] ont toutes deux atteint la puberté à un jeune âge. La [fille 1] a commencé à avoir des seins et a eu ses premières règles à l’âge de 10 ans et la [fille 2] a eu ses règles à 11 ans. À mesure que ses filles grandissaient, le [gendarme X] n’a pas respecté leur souhait d’intimité et d’autonomie. Voici les manquements reprochés :
a) Lorsque la [fille 1] et la [fille 2] étaient jeunes, le [gendarme X] les a d’abord aidées, puis supervisées pendant qu’elles prenaient leur bain dans la salle de bains. La [fille 1] et la [fille 2] prenaient leurs bains ensemble. À l’âge de 10 ans, la [fille 1], qui avait commencé à avoir des seins, a fait savoir à son père qu’elle était trop vieille pour prendre un bain devant lui et lui a demandé de respecter son intimité. Il n’a pas tenu compte de sa demande et a continué à les surveiller à l’heure du bain jusqu’à ce qu’il croie qu’elles étaient suffisamment vieilles pour prendre leur bain en toute sécurité.
b) Le [gendarme X] a interdit à ses [fille 1] et [fille 2] de verrouiller la porte de leur chambre à coucher même lorsqu’elles étaient adolescentes. À une occasion, le [gendarme X] est entré sans frapper dans la chambre de sa [fille 2] pendant qu’elle était partiellement vêtue. Cela a mis cette dernière mal à l’aise.
c) Lorsque la [fille 1] et la [fille 2] jouaient à des jeux vidéo, le [gendarme X] se plaçait souvent derrière elles et leur massait les épaules. Elles avaient déjà atteint la puberté et portaient des soutiens-gorges. Cela les mettait mal à l’aise. Ces incidents se sont poursuivis même lorsque le [gendarme X] vivait à Prince George.
d) Lorsque sa [fille 2] avait 10 ou 11 ans, le [gendarme X] utilisait parfois son sobriquet « bubble-butt », bien qu’elle lui ait demandé de ne pas le faire. Sa [fille 2] avait peu d’estime de soi et ces commentaires y ont contribué.
e) À une occasion, le [gendarme X] a demandé à ses [fille 1] et [fille 2] d’essayer les nouveaux vêtements qu’elles avaient achetés ce jour-là. Il leur a demandé de tourner sur elles-mêmes pour montrer leurs nouveaux vêtements devant ses amis, dont deux hommes. Cela les a mis dans l’embarras et mal à l’aise.
f) À l’occasion, le [gendarme X] frappait ou tapotait les fesses de sa [fille 1] ou de sa [fille 2] de façon amicale ou amusante. Il a continué à le faire après qu’elles ont atteint la puberté, bien qu’elles lui aient demandé de ne pas le faire.
g) Ces gestes ont fait en sorte que la [fille 1] et la [fille 2] se sentent mal à l’aise, gênées, bafouées et craintives à l’égard de leur père.
12. Le [gendarme X] n’avait pas l’intention de rendre ses [fille 1] et [fille 2] mal à l’aise. Il n’a pas posé ces gestes dans un but sexuel. Toutefois, avec le recul, il reconnaît que ces gestes étaient inappropriés compte tenu de leur âge, de leur développement physique et des souhaits qu’elles avaient exprimés. Il a violé leur vie privée et leur autonomie.
13. En juin 2011, la [fille 1] et la [fille 2] ont décidé de ne plus voir leur père. Le [gendarme X] a choisi de ne pas les obliger à le voir et n’a pas revu ses filles depuis.
14. Sa [fille 1] a reçu un diagnostic de dépression grave, d’anxiété et de [trouble de stress post-traumatique], qu’elle attribue au traumatisme subi pendant son enfance, plus particulièrement aux actes du [gendarme X] à son endroit.
15. Le [gendarme x] reconnaît que ses actes, tels qu’ils sont décrits dans l’énoncé détaillé ci-dessus, jettent le discrédit sur la Gendarmerie, en contravention de l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC.
[sic pour l’ensemble de la citation]
Décision relative à l’allégation
[4] Selon l’allégation dont je suis saisi, il y a eu une contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie. L’autorité disciplinaire doit déterminer, selon la prépondérance des probabilités, si le critère en quatre étapes relatif à la conduite déshonorante s’applique.
[5] La première étape consiste à prouver que c’est le gendarme X qui a commis les actes en question. Puisqu’il a admis l’allégation, l’identité n’est pas en cause dans le cas présent.
[6] La deuxième étape de l’application du critère relatif à la conduite déshonorante consiste à déterminer si les actes allégués ont bel et bien été commis. Là encore, je conclus, compte tenu de la proposition conjointe soumise par les parties, que les actes décrits dans l’énoncé détaillé ci- dessus ont été commis par le gendarme X.
[7] La troisième étape de l’application du critère exige une décision à propos de la façon dont une personne raisonnable dans la société, informée de toutes les circonstances pertinentes, y compris des réalités du travail policier en général et de celles de la GRC en particulier, considérerait le comportement. Le seuil relatif à la conduite déshonorante est atteint lorsqu’une personne raisonnable estime que les actes du gendarme X pourraient jeter le discrédit sur la Gendarmerie. Bien qu’il soit utile que le gendarme X ait admis la conduite déshonorante, cela ne met pas fin à l’examen. Il incombe tout de même à l’autorité disciplinaire de démontrer la nature déshonorante de l’inconduite.
[8] L’inconduite du gendarme X dans cette affaire, telle qu’elle est consignée dans l’énoncé détaillé, comporte plusieurs différents types de comportements inappropriés. Cela comprend le recours à une force déraisonnable pour discipliner ses enfants, alors que des mesures disciplinaires peuvent ne pas avoir été nécessaires au départ. Ces comportements comprennent également le recours à une force déraisonnable pour contraindre physiquement la fille 1 lors des transferts de garde. Enfin, cela comprend le non-respect de la vie privée et de l’autonomie personnelle de ses filles à mesure qu’elles passaient de l’enfance à l’adolescence.
[9] Il existe de nombreux modes d’éducation des enfants et niveaux de compétences parentales. Il ne s’agit pas d’une science exacte ni d’un exercice qui est toujours facile. Il y a des centaines, sinon des milliers, de livres sur le sujet. Les personnes qui ont besoin d’aide peuvent faire appel à des conseillers et à des thérapeutes ainsi qu’à des groupes de soutien et à des forums de discussion. Tout cela pour dire que le rôle parental peut être difficile et stressant, surtout pendant une séparation et un divorce acrimonieux.
[10] Quoi qu’il en soit, même dans des circonstances difficiles, les parents doivent quand même traiter leurs enfants de façon raisonnable et respectueuse. Il n’est jamais approprié d’user de force excessive envers un enfant. Il faut aussi respecter la vie privée et l’autonomie physique de tout adolescent.
[11] Dans les circonstances, et après l’aveu du gendarme X, je conclus qu’une personne raisonnable, informée des faits et des réalités du travail policier et de la GRC, estimerait que les actes de ce dernier pourraient jeter le discrédit sur la Gendarmerie.
[12] La quatrième et dernière étape de l’application du critère consiste à déterminer si la conduite déshonorante est suffisamment liée aux fonctions et aux responsabilités du gendarme X pour que la Gendarmerie ait un motif légitime de lui imposer des mesures disciplinaires. Il est généralement compris que les membres de la GRC doivent respecter des normes plus rigoureuses que le grand public en matière de comportement, tant en service qu’en dehors des heures de service. Cette notion est résumée dans le Guide des mesures disciplinaires (2014), qui est conforme aux principes de common law :
La conduite en dehors des heures de service qui ne constituerait pas normalement une infraction criminelle peut tout de même être jugée déshonorante s’il est raisonnable de s’attendre, dans les circonstances, que le comportement nuise à la réputation de la GRC ou à la capacité du membre de s’acquitter de ses fonctions de policier.
[13] Puisque les membres de la GRC sont régulièrement tenus d’enquêter sur des allégations de mauvais traitements et d’agression, que ceux-ci soient de nature sexuelle ou autre, on peut raisonnablement s’attendre à ce que la conduite du gendarme X nuise à sa capacité de s’acquitter de ses fonctions de policier et à la réputation de la Gendarmerie. Par conséquent, j’estime que sa conduite déshonorante est suffisamment liée à ses fonctions et responsabilités de membre de la GRC pour que cette dernière ait un motif légitime de lui imposer des mesures disciplinaires dans le but de réprouver ses actes et de décourager toute inconduite similaire à l’avenir.
[14] Par conséquent, j’estime que la conduite déshonorante a été confirmée.
MESURE DISCIPLINAIRE
[15] Ayant conclu que l’allégation est fondée, je suis tenu d’imposer, conformément au paragraphe 45(4) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), ch. R-10 [Loi sur la GRC] et au Guide des mesures disciplinaires, « une mesure juste et équitable selon la gravité de l’infraction, le degré de culpabilité du membre et la présence ou l’absence de circonstances atténuantes ou aggravantes ». Conformément à l’alinéa 36.2e) de la Loi sur la GRC, les mesures disciplinaires doivent être « adaptées à la nature et aux circonstances des contraventions aux dispositions du code de déontologie et, s’il y a lieu, des mesures éducatives et correctives plutôt que punitives ».
[16] Pour prendre une décision quant à la sanction appropriée, je dois d’abord prendre en considération l’éventail de mesures disciplinaires appropriées, puis les facteurs aggravants et atténuants intervenant dans cette affaire. Je n’ai pas à fonder ma décision sur les décisions prises par d’autres comités de déontologie, mais les décisions rendues dans les cas antérieurs de nature semblable sont utiles pour déterminer l’éventail de mesures disciplinaires applicables. Le principe de la parité des sanctions vise à garantir l’équité, de sorte que les formes similaires d’inconduite soient traitées de la même façon. Ce principe assure la prévisibilité des affaires disciplinaires. Les parties ont invoqué les affaires ci-dessous à l’appui de leur proposition conjointe :
- Commandant de la Division « D » et Gendarme Fahd El Aste, 2018 DARD 18;
- Commandant de la Division « C » et Gendarme Dany Noël, 2019 DARD 11;
- Commandant de la Division nationale et Gendarme X, 2021 DAD 1.
[17] De plus, le Guide des mesures disciplinaires renferme des directives relatives à l’imposition de mesures disciplinaires. Toutefois, ces directives ne sont ni contraignantes ni déterminantes et le Guide demeure un guide.
[18] Lorsque des mesures disciplinaires sont proposées conjointement, je suis tenu de les accepter à moins qu’elles ne soient manifestement déraisonnables ou contraires à l’intérêt public. La Cour suprême du Canada a expliqué cette obligation dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43, au paragraphe 32 :
[32] Selon le critère de l’intérêt public, un juge du procès ne devrait pas écarter une recommandation conjointe relative à la peine, à moins que la peine proposée soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle soit par ailleurs contraire à l’intérêt public.
[19] Les parties ont présenté la proposition conjointe suivante relative aux mesures disciplinaires : une sanction financière équivalant à 20 jours de solde. Afin de déterminer si la sanction proposée est déraisonnable ou si elle jetterait le discrédit sur l’administration de la justice, je dois tenir compte des facteurs aggravants et atténuants. Concernant les facteurs aggravants, je souligne ce qui suit :
- L’inconduite du gendarme X a été répétée à plus d’une occasion et ne constitue pas un événement isolé.
- Le dossier du gendarme X faisait état de mesures disciplinaires connexes antérieures. En 2003, il a fait l’objet d’une mesure disciplinaire pour usage excessif de la force envers un membre de sa famille immédiate. Des mesures disciplinaires informelles ont été prises et une consultation professionnelle a été recommandée. En 2015, il a de nouveau fait l’objet de mesures disciplinaires pour inconduite, bien que l’événement et les circonstances n’étaient pas liés à la présente affaire.
[20] Je retiens les facteurs atténuants suivants :
- Le gendarme X a accepté la responsabilité de son inconduite. Lorsqu’il a pris connaissance des allégations de sa fille 1 sur sa page Facebook, il les a signalées à son superviseur. Il a également admis l’allégation modifiée et il a participé à la proposition conjointe soumise par les parties. Cela a permis d’éviter la tenue d’une audience disciplinaire et l’obligation que ses filles témoignent à l’audience.
- Le gendarme X a un dossier de travail exemplaire et bénéficie du soutien de ses supérieurs, qui témoignent de son intégrité, de son dévouement et de son amour pour son travail ainsi que de sa gentillesse et de son amabilité.
- L’inconduite du gendarme X s’est produite pendant une période difficile et tumultueuse de sa vie, lorsqu’il vivait un divorce extrêmement acrimonieux et un différend entourant la garde de ses filles. Mme Y avait souvent une attitude antagoniste à son égard dans le différend entourant la garde de leurs filles et les transferts de garde. Toutefois, les parties n’ont pas fourni d’indication quant aux mesures que le gendarme X a pu prendre pour faire face à ces facteurs de stress.
[21] J’estime que les facteurs aggravants et atténuants se font contrepoids selon les circonstances de la présente affaire. Je conclus que la proposition conjointe relative aux mesures disciplinaires présentée par les parties est appropriée à l’inconduite reprochée. À mon avis, elle permettra de renforcer l’effet de réprobation et de dissuasion recherché ainsi que de reconnaître que le gendarme X est un employé estimé qui mérite qu’on lui accorde une autre chance. L’acceptation de la proposition conjointe ne risque pas de déconsidérer l’administration de la justice et, par ailleurs, celle-ci n’est pas contraire à l’intérêt public. Par conséquent, j’accepte la proposition conjointe.
DÉCISION
[22] L’allégation contre le gendarme X est fondée. J’impose la mesure disciplinaire suivante :
- une sanction financière équivalant à 20 jours, à déduire de sa solde, conformément à l’alinéa 5(1)j) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291.
[23] L’une ou l’autre partie peut interjeter appel de la présente décision en déposant une déclaration d’appel auprès de la commissaire dans les 14 jours suivant la signification de la présente décision au gendarme X, comme le prévoient l’article 45.11 de la Loi sur la GRC et l’article 22 des Consignes du commissaire (griefs et appels), DORS/2014-289.
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12 janvier 2022 |
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Gerald Annetts Comité de déontologie |
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Edmonton (Alberta) |